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mardi 8 mars 2016

Présidentielle USA 2016. Le centriste Bloomberg ne se présentera pas pour ne pas risquer l’élection de Trump ou Cruz

Michael Bloomberg, centriste et ancien maire de New York, a officiellement renoncé à se présenter à la présidence des Etats-Unis le 8 novembre prochain en tant qu’indépendant.
Le milliardaire qui a fait fortune en créant lui-même son empire de médias financiers, souhaitait depuis de nombreuses années concourir à la présidentielle.
Déjà, en 2007, il avait mené des tests pour savoir s’il avait une chance de l’emporter.
Même si cette année, à 74 ans, il avait moins d’appétence pour une campagne électorale, lui qui avait repris directement la direction de son entreprise l’année dernière, la volonté de barrer la route à la Maison blanche aux populistes Donald Trump et Bernie Sanders ou à l’extrémiste Ted Cruz lui avait fait envisager très sérieusement de se présenter.
Il avait commencé à élaborer son plan de bataille, fait réaliser des études et des tests notamment au Texas et en Floride, choisi son équipe de campagne, trouver ses slogans et logos et même trouver son éventuel vice-président.
Il avait prévu de consacrer un milliard de dollars de sa fortune personnelle à cette campagne et de refuser tous les dons et financements extérieurs pour demeurer le plus indépendant possible de tous les intérêts particuliers.
Les sondages qu’il avait faits réalisés ainsi que les projections en nombre de grands électeurs qu’il pourrait avoir étaient assez encourageants même s’il ne lui donnaient pas un avantage sûr et certain.
C’est une des raisons de son renoncement mais pas le principal.
Car, pour l’emporter mais aussi pour légitimer sa candidature, il fallait que le duel républicain-démocrate oppose Trump ou Cruz à Sanders.
Or, selon toute vraisemblance, celui-ci aura pour acteurs Donald Trump du côté républicain (à moins d’une cabale réussie par l’establishment contre le promoteur immobilier) et Hillary Clinton, une centriste.
Dès lors, la candidature de Bloomberg risquait de faire doublon avec celle de Clinton, surtout et principalement, de diviser les voix des modérés et des centristes et de permettre à Trump de l’emporter.
Pour annoncer sa non-candidature, Bloomberg a signé cette tribune sur le site d’opinions de son empire médiatique, intitulée «The risk I will not take», le risque que je ne prendrai pas (lire celle-ci en version originale ici):
«Les Américains sont aujourd'hui face à un défi profond afin de préserver nos valeurs communes et la promesse de la nation.
La stagnation des salaires dans le pays et notre influence en déclin à l'étranger ont mis les Américains en colère et mes rendent frustrés. Et pourtant, à Washington, on ne propose rien d'autre que le blocage des institutions et des attaques partisanes.
Pire encore, les candidats présidentiels actuels désignent des boucs émissaires au lieu de proposer des solutions, et font des promesses qu’ils ne pourront finalement pas tenir. Plutôt que d'expliquer comment ils vont briser la fièvre partisane qui paralyse Washington, ils en rajoutent sur ses dysfonctionnements.
Au cours de l'histoire américaine, les deux partis ont eu tendance à désigner des candidats présidentiels qui restaient proches du Centre et construisaient à partir de celui-ci. Mais cette tradition est en panne. L’extrémisme est en marche, et à moins que nous le stoppions, nos problèmes à l’intérieur et à l'extérieur du pays vont empirer.
Beaucoup d'Américains sont évidemment consternés par cela, et je partage leurs préoccupations. Les candidats démocrates en tête des primaires ont attaqué les politiques qui ont stimulé la croissance et les opportunités sous la présidence de Bill Clinton – soutien pour le commerce, écoles privées sous contrat, réduction du déficit et le secteur financier. Pendant ce temps, les principaux candidats républicains ont attaqué les politiques qui ont stimulé la croissance et les opportunités sous la présidence de Ronald Reagan, y compris la réforme de l'immigration, le compromis sur les impôts et la réforme du droit, ainsi que le soutien aux budgets bipartisans. Les deux présidents étaient des résolveurs de problèmes, et non des puristes idéologiques. Et tous les deux ont permis au pays d’aller de l’avant de façon importante.
Au cours des derniers mois, de nombreux Américains m’ont poussé à me présenter à l'élection présidentielle comme indépendant, et certains qui n'aiment pas les candidats actuels ont dit qu'il est de mon devoir patriotique de le faire. Je les remercie de leurs appels, et j'ai réfléchi sérieusement à cette question. La date limite pour y répondre est venue, en raison des conditions d'accès à la présidentielle.
Mes parents m'ont appris l'importance de redonner ce que l’on a reçu et le service public a été une partie importante de ma vie. Après 12 ans en tant que maire de New York City, je connais les sacrifices personnels que les campagnes électorales et les fonctions d’élus exigent, et je serais heureux de rendre service à nouveau afin d'aider le pays que j'aime.
J’ai toujours été attiré par des défis impossibles, et aucun d'aujourd'hui n’est plus important que la fin de la guerre partisane à Washington et de gouverner pour le peuple américain – et non pas pour les lobbyistes et les donateurs des campagnes électorales. Pour faire ce changement, il faudrait élire des dirigeants qui sont plus axés sur l'obtention de résultats que de gagner leur réélection, qui ont l'expérience dans la création de petites entreprises et la création d'emplois, qui savent comment équilibrer les budgets et gérer les grandes organisations, qui ne sont pas redevables à des intérêts particuliers – et qui sont toujours honnêtes vis-à-vis du peuple. Je suis flatté que certains pensent que je pourrais fournir ce genre de leadership.
Mais quand je regarde les données, il est clair pour moi que si j’entre dans la course, je ne pourrais pas gagner. Je crois que je pourrais gagner un certain nombre d’Etats – mais pas assez pour gagner les 270 votes du collège électoral nécessaires pour remporter la présidence.
Dans une course à trois, il est peu probable qu’un candidat gagnerait la majorité des voix électorales, dès lors le pouvoir de choisir le président serait retiré des mains du peuple américain et donné au Congrès. Le fait est, même si je devais recevoir le plus grand nombre de votes populaires et avoir le plus grand nombre de grands électeurs, la victoire serait peu probable, parce que la plupart des membres du Congrès voteraient pour le candidat de leur parti. Les loyalistes du parti majoritaire au Congrès – et non le peuple américain ou le collège électoral – détermineront alors le prochain président.
Actuellement, avec les républicains en charge des deux chambres, il y a de bonnes chances que ma candidature conduisent à l'élection de Donald Trump ou à celle du sénateur Ted Cruz. C’est un risque que je ne peux pas prendre en bonne conscience.
Je connais M. Trump depuis de nombreuses années, et nous avons toujours été en bons termes. J'ai même accepté de figurer dans son émission ‘The Apprentice’ deux fois. Mais il mène la campagne présidentielle la plus clivée et la plus démagogique  que j’ai jamais vue, surfant sur les préjugés et les craintes des gens. Abraham Lincoln, le père du Parti républicain, avait fait appel à nos ‘meilleurs anges’. Trump fait appel à nos pires impulsions.
Menacer d’empêcher les musulmans d'entrer dans le pays est une attaque directe sur deux des valeurs fondamentales qui ont donné lieu à notre nation: la tolérance religieuse et la séparation de l'Église et de l'État. Promettre d'expulser des millions de Mexicains, feindre d’ignorer l’existence des suprémacistes de la race blanche, menacer la Chine et le Japon d’une guerre commerciale, tout cela est dangereusement mauvais. Ces mesures nous diviseraient et compromettraient notre leadership moral dans le monde entier. Le résultat final enhardirait nos ennemis, menacerait la sécurité de nos alliés, et mettrait nos propres hommes et femmes qui portent l’uniforme face à un risque accru.
La démagogie du sénateur Cruz sur l'immigration n’a peut être pas l'excès rhétorique de Trump, mais elle n’en est pas moins extrême. Son refus de s’opposer à l'interdiction des étrangers en fonction de leur religion peut être moins emphatique que la position de Trump, mais il n’en crée pas moins des divisions.
Nous ne pouvons pas ‘faire grande l'Amérique à nouveau’ en tournant le dos aux valeurs qui ont fait de nous la plus grande nation du monde. J'aime trop notre pays pour jouer un rôle dans l'élection d'un candidat qui affaiblirait notre unité et assombrirait notre avenir – et je ne vais donc pas entrer dans la course à la présidence des États-Unis.
Cependant, je ne resterai pas silencieux sur la menace que l'extrémisme partisan fait peser à notre nation. Je ne suis pas prêt à soutenir un candidat, mais je vais continuer à encourager tous les électeurs à rejeter les appels à la division en exigeant que les candidats offrent des idées intelligentes, spécifiques et réalistes pour réduire les fractures et résoudre les problèmes, et gouvernent de manière honnête et capable.
Pour la plupart des Américains, la citoyenneté nécessite un peu plus que de payer des impôts. Mais beaucoup ont donné leur vie pour défendre notre nation – et nous avons tous une obligation comme électeurs de défendre les idées et les principes qui, comme l'a dit Lincoln, représentent ‘le dernier espoir de la terre’.
J’espère et je prie d’agir ainsi.»


Alexandre Vatimbella

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