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vendredi 22 novembre 2019

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. La démocratie a-t-elle mérité Trump?

Au moment où se tient à la Chambre des représentants des Etats-Unis la procédure publique officielle de l’impeachment (destitution) de Donald Trump à propos de sa demande d’aide au gouvernement ukrainien de salir son principale opposant à la présidentielle de 2020, le démocrate et ancien vice-président de Barack Obama, Joe Biden, en échange d’une aide militaire (déjà votée par le Congrès et qu’il ne pouvait bloquer comme il l’a fait), une question essentielle se doit d’être posée: la démocratie a-t-elle mérité un tel personnage, c’est-à-dire un populiste démagogue, menteur, malhonnête, incompétent, sexiste, raciste qui excite les pires travers humains, notamment de ses électeurs et ses soutiens et dont beaucoup de gens estiment qu’il a de graves problèmes mentaux le rendant inapte à sa fonction.
De manière plus directe et plus provocatrice, Trump [c’est-à-dire son archétype] est-il un produit «naturel» de la démocratie?
Est-il une conséquence inexorable (à termes répétés de tels personnages) d’un régime qui permet à n’importe qui de pouvoir être président?
Mais on peut aussi poser la question, quelque peu différente, de savoir si Trump est un produit de ce qu’est devenue actuellement la démocratie voire de l’«approndissement» d’un régime démocratique.
A l’inverse, on peut se demander s’il est un accident ou une erreur de la démocratie ou le produit d’un dévoiement de la démocratie.
Et si ce dévoiement vient de l’«intérieur» de la machinerie démocratique (comme, par exemple, la montée d’une autonomie irresponsable de l’individu) ou de l’«extérieur» (comme, par exemple, la prégnance d’une idéologie néo-libérale et financière régissant le capitalisme moderne)?
Pour bien poser le débat, rappelons rapidement ce que sont les fondements d’une démocratie et quel est l’état actuel des régimes démocratiques et/ou de l’avancée démocratique dans les pays qui connaissent ce régime depuis plus ou moins longtemps.
La formule d’Abraham Lincoln utilisé lors de sa fameuse adresse sur le champ de bataille de Gettysburg encore fumant lors de la guerre de sécession (appelée de manière plus appropriée guerre civile aux Etats-Unis) est un début: «le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple».
Ajoutée à la devise de la République française (liberté, égalité, fraternité), le portrait devient plus consistant.
Mais cela n’est pas suffisant parce qu’il faut y ajouter ce que certains estiment tout aussi important que la volonté de la majorité, celle de la protection de la minorité, c’est-à-dire qu’il ne peut y avoir de démocratie si l’on ne garantit pas les droits inaliénables de ceux qui ne pensent pas comme la majorité mais qui se plient à la règle démocratique.
En quelques sorte c’est l’application légale d’une vertu essentielle du vivre ensemble démocratique, le respect de la dignité de toute personne (ce dernier recouvre toutefois un champ plus étendu).
Enfin, et ce n’est pas un des moindres éléments, la démocratie est un pari fait sur l’humain.
Si les Pères fondateurs des Etats-Unis se méfiaient des masses et avaient décidé d’élaborer une constitution où des garde-fous devaient empêcher tout débordement populistes (on a vu que ceux-ci n’étaient guère efficaces avec l’élection de Trump…), ils croyaient néanmoins comme beaucoup des partisans de la démocratie que cette dernière permettrait une émancipation de l’individu qui serait, au fil du temps, de plus en plus capable d’être un citoyen responsable grâce aux bienfaits des valeurs démocratiques, en particulier l’éducation pour tous.
Il serait alors capable de défendre ses intérêts personnels et ceux de ses proches dans le cadre d’une communauté libre où, tout en défendant son point de vue, on accepterait ceux des autres et admettrait que les décisions devraient se prendre en toute responsabilité face au réel.
Dès lors, pour que ce système fonctionne, le choix des dirigeants d’un pays ne peut évidemment se faire que par les élections de représentants élus par tous les citoyens (sachant l’inapplicabilité de la démocratie directe dans des sociétés complexes et importantes que sont les démocraties républicaines).
Et c’est ici que se place le cœur de nos interrogations de départ.
Si le «peuple» (en réalité l’agrégation de tous les individus qui sont régis sur un même territoire par la même règle juridique) choisit, il est donc légitime de se demander quels sont les critères de son vote qui peuvent aboutir à l’élection d’une personnage comme Donald Trump.
Je ne rentrerai pas ici dans la controverse du collège électoral qui élit en réalité le président des Etats-Unis, composé de délégués élus Etat par Etat, permettant donc qu’un candidat ayant moins de voix qu’un autre (ce qui fut le cas de Trump en 2016 face à Hillary Clinton, avec un déficit de près de trois millions) accède à la plus haute marche de l’Etat.
Car – si j’estime que ce système qui devait modérer le choix d’un président a complètement failli (comme il avait déjà failli en 2000 avec l’élection de George W Bush) –, il est tout à fait légitime dans le sens où le «peuple» ne l’a jamais remis en cause, en tout cas, n’a jamais voté pour le supprimer.
L’idée que tout le monde – et donc n’importe qui – peut se présenter à une élection est un principe de la démocratie.
Bien entendu, celle-ci, partout où elle existe, a mis des conditions restrictives mais, globalement, l’énorme majorité de la population d’un pays peut se présenter et se faire élire.
On comprend bien que l’écrémage se fait également par le biais de médiateurs comme les partis politiques ou des reconnaissances venant des mondes économiques, sociaux, culturels ou sociétaux.
Sans oublier les médias qui peuvent promouvoir (consciemment ou non) un individu et lui donner une légitimité qui peut prêter à controverse.
Evidemment, un inconnu sans soutien et venant de nulle part peut tenter sa chance mais il a une probabilité d’être élu qui est très faible voire nulle.
Maintenant, il nous faut parler de l’état actuel de la démocratie dans les pays où existe réellement un tel régime politique.
L’évolution de ce dernier ressemble un peu aux craintes que pouvaient avoir les Pères fondateurs de la nation américaine dont nous avons vu plus haut qu’ils espéraient que la confrontation des intérêts particuliers et un gouvernement qui serait fait de poids et de contre-poids assureraient néanmoins un équilibre salutaire ainsi que celles d’Alexis de Tocqueville.
Ils ne croyaient pas dans la bonté inhérente de l’humain mais dans sa capacité à évoluer et, dans ce cadre, à acquérir une sagesse suffisante pour faire fonctionner un système d’une grande force idéale mais d’une grande fragilité structurelle.
Mais, aujourd’hui, ce n’est pas vraiment cette démocratie responsable qui a vu le jour mais plutôt une démocratie consumériste issue de la montée en puissance de l’autonomie de l’individu, un bienfait dans son essence mais qui s’est malheureusement faite dans l’irresponsabilité, dans l’insatisfaction chronique et dans l’assistanat avec des comportements irrespectueux, égoïstes, égocentriques.
Le tout dans des agirs qui sont largement dans l’immédiateté, dans la croyance plutôt que la connaissance, voire dans l’ignorance et l’opposition systématique à tout pouvoir, même celui qui est démocratiquement légitime.
Dans ce cadre, l’élection d’un archétype trumpien n’est, son seulement pas une surprise mais une sorte de conséquence de l’hydre créé, non pas par la démocratie, mais par son dévoiement même s’il faut se demander si ce dévoiement n’est pas inscrit dès le départ dans la promesse démocratique.
Et force est de reconnaître qu’il y a des indices qui militent en ce sens.
Ainsi, le pari démocratique ne semble fonctionner correctement (jamais parfaitement) lorsque les individus retirent de celui-ci des gratifications immédiates comme lorsqu’il y a une forte croissance économique.
Mais dès qu’il faut faire des efforts, dès qu’il y a des problèmes et des obstacles importants au progrès, alors le vote est une arme de sanction, non pas contre les élus en place, mais contre le régime lui-même.
Cela peut aboutir, dans les cas les plus extrêmes, à la prise du pouvoir légale d’un Adolph Hitler (mais l’on pouvait penser ici que le régime démocratique en Allemagne était encore trop récent donc trop faible pour faire face à la montée du nazisme sur fond de la Grande dépression) et plus généralement à l’élection de personnages tel que Donald Trump (et ses avatars un peu partout dans le monde).
Bien entendu, il n’y a pas d’unanimité du «peuple» pour les installer au pouvoir – même pas de majorité pour ce qui concerne le président américain actuel – mais, néanmoins, une majorité ou une forte minorité – qui profite de l’émiettement partisan que peut créer la démocratie.
Maintenant, dire que la démocratie a mérité Trump est une problématique qui se superpose au mécanisme dont on vient de parler.
Cela suppose en effet que quoiqu’il arrive, le régime démocratique sortira de sa boite de Pandore des Trump à périodes répétées, voire, dans les années à venir, quasi-systématiquement.
De ce point de vue, il est bon de ne pas oublier les Orban, Erdogan, Duterte, Bolsonaro et autres Salvini qui occupent ou ont occupé le pouvoir (et pourront à nouveau l’occuper) et évidemment ceux qui sont en attente comme Le Pen ou Iglesias.
En fait, nous sommes sans doute à un tournant des régimes démocratiques et celui-ci peut prendre toutes les directions possibles sans pour autant affirmer que le pire (c’est-à-dire l’institutionnalisation de l’archétype Trump) sera la réalité de demain.
Bien entendu, on peut dire que le «peuple» américain a accepté la présidence d’un démagogue populiste escroc, menteur, etc. sans se rebeller, sans le renverser et, parfois, dans une apathie coupable.
Cependant, on pourra éventuellement parler d’«accident de l’Histoire» s’il est battu lors de la présidentielle de 2020 (en revanche s’il est réélu le thèse accidentelle ne tiendra plus la route, d’où l’importance cruciale de cette élection pour l’avenir de la démocratie).
Eventuellement, dis-je, car si cette défaite sera salutaire pour le régime démocratique, cela ne signifiera pas pour autant un retournement des tares issues du dévoiement de l’idéal démocratique.
Et c’est bien là que le bât blesse profondément l’animal démocratique.
Car si la démocratie est condamnée à être une organisation de la société d’une grande faiblesse – ce qui fait son extraordinaire attrait tellement elle est émancipatrice et progressiste dans ses valeurs et ses principes –, elle tire sa force d’une sorte de consensus qui dit que si elle n’est pas parfaite, elle reste le meilleur ou le moins mauvais système où chacun peut faire valoir ses intérêts.
Or, la montée de l’autonomisation irresponsable, égocentrique, assistée, insatisfaite et irrespectueuse de l’individu peut nous amener, plus vite qu’on ne le pense, dans une pseudo-démocratie, médiacratique, médiocratique, populiste, démagogique et consumériste, totalement ingérable et donc prélude à des régimes autoritaires voire totalitaires.
On peut espérer que tel ne sera pas le cas et que les forces qui poussent la démocratie à exister seront plus fortes que celles qui veulent la détruire et en faire un système qui a failli en un temps record face à la longueur de l’Histoire de l’Humanité.
Et si c’est cette dernière alternative qui est la bonne, on pourra alors dire que, oui, la démocratie, en ce début de deuxième millénaire, avait mérité Trump.
C’est la seule réponse que l’on peut faire actuellement.
Mais cela ne veut donc pas dire que le pire va survenir.
Cela signifie qu’il y a un risque qu’il survienne mais que nous pouvons agir pour l’en empêcher.
Comment?
En misant sur l’émergence de cet individu libre, responsable, respectueux.
Non pas en l’attendant comme un messie mais en travaillant d’arrache-pied à ce qu’il devienne une réalité.
Certains prétendront qu’il s’agit d’un travail de Sisyphe, d’une utopie irréalisable et ils pourraient bien avoir raison.
Mais, comme je l’ai dit, la démocratie est un pari sur l’humain et tant qu’on peut parier sur l’espoir, il y a lieu de le faire.
In fine, néanmoins, il faut bien comprendre que cette situation se déroule non pas à la fin du XVIII° siècle quand les Etats-Unis sont devenus la première démocratie moderne, non pas au début du XX° siècle où cette même démocratie était dans sa jeunesse là où elle était implantée, non pas après la Deuxième guerre mondiale où il fallait reconstruire un peu partout l’architecture démocratique mais bien dans le premier quart du XXI° siècle dans un pays – les Etats-Unis – qui connaissent la démocratie depuis près de 250 ans.
Bien sûr, par rapport au temps historique, on peut considérer qu’un quart de millénaire n’est pas très important pour un système politique notamment si on le compare à d’autres qui ont duré nettement plus longtemps, certains pendant des milliers d’années.
Mais l’on peut aussi considérer que ce quart est assez long pour savoir si un tel système est viable sur le long terme, c’est-à-dire qu’il a pu éliminer ou bloquer efficacement certaines tares qui menacent de le détruire de l’intérieur.
C’est la fameuse vision du verre à moitié plein ou à moitié vide.
Quoi qu’il en soit, c’est un problème que devra régler aussi rapidement que possible la démocratie pour démontrer qu’elle est viable au XXI° siècle et pour ceux qui vont suivre.
Si elle n’y parvient pas alors, oui, la démocratie aura mérité Trump.
Sans doute pour notre malheur.

samedi 9 novembre 2019

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. 30 ans après Berlin, nous sommes en train de reconstruire des murs

La chute du mur de Berlin, c’était il y a trente ans, un 9 novembre 1989, dans l’euphorie, non pas que le système capitaliste avait terrassé le système communiste comme le prétendent les ignorants et les falsificateurs de l’Histoire, mais de la victoire de la Liberté, celle avec un grand L. Bien sûr, la boucherie de la place Tienanmen à Pékin quelques semaines plus tôt exécutée par les communistes chinois sous la direction du «grand réformateur» (sic!) Deng Xiaoping, avait un peu terni cette période où l’on voyait les régimes autoritaires et dictatoriaux s’effondrer les uns après les autres et qui aboutirait, in fine, à la disparition de l’Union soviétique.
Mais l’on se disait que la Chine – mise au ban des nations et qui n’était encore qu’une «puissance émergente» – serait obligée, volontairement ou non, de suivre le «sens de l’Histoire» qui semblait indiquer que la marche de la liberté mais aussi de toutes les valeurs humanistes était devenue irrésistible.
Trente ans après, que de désillusions et de rappels à la réalité!
Mais surtout que d’inquiétudes et d’angoisses devant un monde où les extrémistes, les populistes, les démagogues, les escrocs, les affairistes et les bouriscoteurs, sans oublier les terroristes tiennent le haut du pavé dans un mélange indigeste liberticide et de corruption, d’enrichissements indécents et de violences en tous genres.
Un monde qui s’éloigne du respect de la dignité humaine et où se meuvent les personnages les plus malfaisants et les organisations les plus nauséabondes qui sèment le désordre, le chaos, la haine et la mort au nom d’idéologies abjectes ou d’intérêts particuliers, voire personnels, dans un flot de propagande (que l’on appelle désormais «fake news»…) et de complots que même le KGB et la Stasi (polices politiques respectivement de l’URSS et de l’Allemagne de l’Est) n’avait pu mettre en œuvre malgré leur puissance lors de la Guerre froide.
Oui, trente ans après que nous ayons cru naïvement – mais que cette naïveté avait le goût du bon! – à un monde meilleur, nous sommes en train de reconstruire, non pas un mur, mais une multitude murs partout dans le monde et en particulier en Europe qui aboutiront, si l’on n’inverse pas la tendance, à ce que le Vieux continent (mais aussi l’humanité toute entière) sait malheureusement faire le mieux: la guerre…
Nous voilà donc à un nouveau tournant de l’Histoire, bien éloigné de celui de 1989.
Bien éloigné également de l’espoir d’une construction européenne qui, ne l’oublions pas, avait comme un de ses buts de lutter contre le totalitarisme qui sévissait derrière le rideau de fer et de réunir l’ensemble des pays européens dans une vaste fédération des Etats-Unis d’Europe.
Car 1989 – avec toutes les difficultés que l’on pouvait déjà soupçonner – devait être, sinon l’apothéose d’une Europe unie, en tout cas la pierre angulaire sur laquelle tout l’édifice de ces Etats-Unis allait s’édifier.
Ce ne fut pas le cas même si l’élargissement de l’Union fut accomplie, certes dans une absence de logique que nous payons aujourd’hui mais, il est bon de le rappeler, dans une volonté de créer des liens entre des pays qui menaçaient de se faire la guerre entre eux pour des questions de nationalités (bonjour les séquelles du Traité de Versailles et du découpage de l’Europe en 1945!) comme entre la Hongrie et la Roumanie et qui eut lieu dans le seul endroit où l’on intégra pas, la Yougoslavie…
Reste que les défis d’aujourd’hui sont encore plus prégnants qu’en 1989 avec, non seulement, un monde où la démocratie républicaine est en danger mais où l’Humanité entière l’est également avec les problèmes environnementaux, ceux de l’accès à l’eau et à une nourriture suffisante sans oublier une augmentation de la population mondiale non encore maîtrisée, tout ceci étant loin d’être exhaustif.
Alors, comme dirait l’autre, messieurs et mesdames les maîtres et maîtresses du monde, faites tomber ces murs!

Alexandre Vatimbella

mardi 5 novembre 2019

Commentaire. Et si le principal gagnant du chaos créé par Trump était la Chine?


On l’a déjà dit ici mais pendant que Trump et ses sbires faisaient l’actualité en compagnie de Poutine et de ses alliés autocrates et, pour certains, couverts de sang, un pays avait décidé de faire parler de lui le moins possible, la Chine.
Pas pour des raisons de modestie ou de manque d’assurance en son régime, pas pour se rapprocher de la communauté internationale et encore moins pour plaire aux démocraties occidentales.
Non, pendant que Trump créait un véritable chaos dans la mondialisation et les relations internationales, détruisant avec l’inconséquence qui l’habite toute l’architecture mise en place par la diplomatie américaine depuis plus d’un siècle, les responsables du Parti communiste chinois avec à leur tête le «Mao au petit pied», Xi Jinping, verrouillait la société chinoise comme jamais elle l’a été depuis les heures les plus sombres du régime maoïste mais aussi des dynasties impériales qui se sont succédé au cours de l’Histoire.
Rappelons que monsieur Xi, profession dictateur, veut mettre en place son fameux «rêve chinois» (pour contrer le plus que fameux «rêve américain») qui est un mélange indigeste de nationalisme, de puissance économique, de force militaire et de préceptes surannés du marxisme-léninisme (surtout le côté dictature du parti unique, seul détenteur de la vérité) afin de maintenir la clique actuelle à la tête du pays, ivre de son pouvoir et qui s’est remplie les poches par la corruption généralisée.
Le tout avec une mise en surveillance de l’ensemble de la population grâce à toutes les technologies modernes, en particulier celles de l’intelligence artificielle, couplées avec toutes les vieilles recettes pour contrôler les citoyens et les empêcher de s’exprimer (voir les camps de concentration au Xinjiang).
Comme l’expliquait récemment le sinologue François Godement au Figaro:
«Le PCC a construit le système de contrôle de la population le plus extraordinaire qu’on puisse concevoir. Cela s’est fait en deux étapes. Celle du maoïsme: une ligne de masse et un contrôle de la population par la densité et la présence du Parti communiste. Sous Xi Jinping, il s’exerce aussi par la maîtrise de la technologie numérique et un contrôle sous toutes ses formes de la population.»
Et son projet – même si l’appellation «rêve chinois» est moins utilisée –, grâce à Donald Trump, à ses décisions imbéciles, à son accaparement des médias et au rejet qu’il inspire de plus en plus à la communauté internationale, a pris de l’ampleur.
Tellement que la dernière réunion du Comité central du PCC qui vient de se terminer à Pékin a posé de nouveaux objectifs à cette avancée majeure du totalitarisme et à la volonté de la Chine communiste de dominer le monde avec comme date butoir, 2049, c’est-à-dire le centenaire de la prise du pouvoir par les forces maoïstes.
On savait déjà que la vision politique du grand dirigeant et néanmoins camarade Xi était désormais mentionnée dans la Constitution sous la dénomination «la pensée de Xi Jinping» (ajoutons que l’agence de presse officielle chinois, Xinhua, nous apprend qu’un livre vient d’être publié de 27 octobre contenant «70 propos importants extraits de discours et d'autres documents rédigés par M. Xi entre novembre 2012 et juillet 2019») comme celle du grand timonier Mao mais les documents rédigés à l’occasion de cette réunion ainsi que les décisions prises vont toutes dans le sens d’un nouveau tour de vis vis-à-vis de tout ce qui reste de démocratique dans le pays dont les quelques dissidents qui ont encore réussi à échapper aux forces de répression du pouvoir.
Ceci inclut évidemment la grande majorité de la population de Hongkong qui a compris ce que les Occidentaux ne veulent pas voir: la liberté est en train de mourir complètement en Chine dans une sorte de désintérêt des démocraties au premier rang desquels les Etats-Unis mais aussi l’Union européenne.
Nous pouvons ainsi avoir honte de nous-mêmes: après avoir permis à la Chine de devenir la deuxième puissance économique en lui permettant de produire tout ce dont nous avions besoin à des prix cassés (avec toutes les conséquences sociales pour les travailleurs des pays occidentaux mais aussi écologiques), nous sommes en train de lui permettre d’être la prochaine première puissance mondiale qui se sera bâtie sur un projet clair: détruire totalement les valeurs humanistes que porte la démocratie républicaine.
En revanche, celui qui en fera certainement sa fierté c’est Donald Trump qui a promu tous les autocrates et les dictateurs de la planète depuis le début de se présidence avec une constance qui n’est pas simplement de la bêtise mais aussi de l’admiration sincère.
Comme l’explique le politologue Chen Daoyin à propos de la volonté du Parti communiste chinois:
«Tout ce qui est occidental est rejeté. Le message central est que le Parti dirige tout, de la société à l’économie en passant par la culture. L’objectif est d’accoucher d’un régime capable de rivaliser avec le système démocratique occidental en 2049».
En tout cas, on ne pourra pas dire qu’on n’a pas été prévenu…

Aris de Hesselin & Alexandre Vatimbella

lundi 4 novembre 2019

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Peut-on réconcilier le travailleur, l’électeur et le consommateur?

L’individu est multiple, cela est un fait.
Chacun de nous – sans être pour autant schizophrène – vit plusieurs existence à la fois qui s’entrechoquent et s’opposent, ce qui donne souvent un magma de positionnements et de croyances d’où sortent nos comportements parfois contradictoires voire opposés les uns aux autres.
Ainsi, en tant que travailleur (salarié ou indépendant), nous voulons maximiser les profits (financiers ou non) de notre activité.
En tant que consommateur, nous voulons maximiser notre pouvoir d’achat et notre capacité à avoir le plus et le mieux avec le moins possible de dépenses.
En tant qu’électeur, nous jonglons entre nos convictions et nos intérêts.
Et ceci est constant.
Prenons un exemple édifiant qui s’est imposé dans le débat politique avec le mouvement de foule des gilets jaunes, la voiture (et, en l’occurrence le prix de l’essence et, notamment, le montant des taxes, en l’espèce celle de la taxe carbone).
Le salarié d’un constructeur automobile veut évidemment que les voitures se vendent.
Mais en tant que conducteur-consommateur – qui doit peut-être utilisé son véhicule pour se rendre à son travail –, il veut que l’essence soit la moins chère possible.
Et en tant qu’électeur, il veut qu’on lui assure la sécurité de conduire sans effet néfaste pour sa santé.
Dès lors, il veut – entre autres – que ceux qu’il choisit pour nous gouverner, à la fois, s’occupe de l’industrie automobile pour son emploi, de l’essence pour ses déplacements et de la qualité de l’air pour sa santé et sauver, accessoirement, la planète (en réalité l’Humanité).
Et si cela est impossible de maximiser ses trois demandes et qu’il faut des réformes plus ou moins drastiques pour parvenir au meilleur choix possible, il va s’y opposer, revendiquer, manifester et, peut-être, commettre des actes de violences, tout en écoutant les sirènes des populistes démagogues qui lui promettent un paradis qui n’a jamais existé s’il se tourne vers eux.
Un autre exemple, à deux bandes celui-là, est une constante du comportement humain.
En tant que travailleur-contribuable, je veux payer le moins d’impôt possible alors qu’en tant que consommateur de services publics et bénéficiaire d’aides de la part de l’Etat, je veux en avoir le plus possible.
Ce cercle vicieux où chacun de nous se renvoie à lui-même la balle en tant que travailleur-électeur-consommateur ou, plus simplement, en tant que citoyen vivant dans une société humaine, est-il une malédiction éternelle (ou jusqu’à l’extinction du genre humain)?
La réponse semble a priori guère optimiste.
Pourquoi, alors que l’être humain fonctionne de cette manière depuis toujours, changerions nous ?
Cependant, au cours de l’Histoire et même si des civilisations sont mortes du fait de l’inconséquence des comportements humains, nous sommes aujourd’hui confrontés à un véritable défi quant à notre finitude.
En effet, grâce aux progrès de la connaissance et de la science, aujourd’hui, nous savons.
Car même si le pire n’est pas sûr, nous sommes capables de faire un état des lieux que nos ancêtres n’étaient pas outillés pour le faire ainsi que des projections sur ce qui peut advenir avec la masse des données que nous pouvons collectées.
Cela nous donne un avantage énorme sur nos prédécesseurs, encore faut-il que nous soyons assez responsables pour en profiter.
Là aussi, une réponse peu optimiste semble s’imposer face à notre irresponsabilité criante.
Celle-ci se manifeste par la volonté de faire d’abord triompher nos intérêts personnels à court terme avant de nous préoccuper de ceux de notre avenir et de notre descendance.
Il faut dire que nous sommes sûrs d’être là, vivant, dans ce moment précis, mais peut-être pas dans celui d’après…
Bien sûr, si on interroge les gens sur le degré d’implication dans les défis existentiels qui sont là ou se profilent, ils répondront, comme les sondages en attestent, qu’ils sont fort inquiets et qu’il faut agir.
Mais quand vient l’action, tout cette bonne volonté s’étiolent et n’en restent que quelques uns qui, malgré ce que pensait l’écrivain américain Henry Miller, ne seront pas assez nombreux pour changer le monde en bien.
On le voit bien aussi dans les réformes – dont on ne rappellera jamais assez qu’elles sont indispensables, un pays immobile est un pays qui meurt – où, dans les principes, tout le monde semble d’accord mais où dans l’application de ceux-ci, beaucoup de monde est opposé.
Tout ceci nous démontre que nous n’agissons réellement que contraints et forcés.
C’est malheureux mais c’est une réalité.
Dès lors, il faut bien qu’il y ait, ce que l’on pourrait appeler des éveilleurs de conscience ou tout simplement des lanceurs d’alerte qui viennent nous donner des coups de pied dans les fesses pour que nous bougions et agissions.
Et ces éveilleurs se retrouvent le plus souvent impopulaires et rejetés quand ils prennent des décisions alors que dans les démocraties, ils ont été élus pour les prendre (on retrouve là toute la contradiction dont je parle depuis le début).
Ce qui n’est évidemment pas une situation facile, ni même voulue car l’individu recherche d’abord à être aimé de ses semblables, non à être cloué au pilori.
D’où, d’ailleurs, de nombreux reniements de la part de ces responsables politiques qui fuient, tout autant, contre la difficulté que contre le désamour.
Sur tout cela s’ajoute une autre réalité bien plus insoluble, celle qui fait que dans les trois-quarts des pays de la planète, la majorité des habitants veulent seulement vivre au jour le jour et sont prêts à tout pour y parvenir, surtout en ne se souciant pas vraiment de l’avenir de la planète alors même qu’ils n’en ont aucun.
Alors, bien sûr, comme le disent certains, ils sont aussi, voire les principales, victimes des problèmes qu’il faut résoudre et, sans doute, les principaux bénéficiaires de réformes qu’il faut mettre en place.
Mais aucun beau discours sur le sujet ne changera pas leur unique but: survivre.
Du coup, le progrès technologique reprend une place centrale dans les solutions à trouver pour nous garantir un avenir meilleur.
Un progrès technologique que l’on peut également utiliser pour résoudre, en partie, l’opposition travailleur-consommateur-électeur dans nos contrées.
Pour autant,  ce progrès ne peut pas tout malgré ce que certains affirment (souvent dans un discours quasiment métaphysique où, tel un messie, il viendrait nous sauver de nos inconséquences) c’est bien dans les décisions responsables et souvent difficiles que se trouvent une grande partie des solutions.
Et point de reculade.
Ce n’est plus une option.
Le Centrisme, qui prône le juste équilibre, la réforme permanente (comme mise à niveau par rapport à la réalité de la vie et non par rapport à tel ou tel lobby comme on peut l’entendre) et la responsabilité, est la pensée de ce changement du monde (et non d’un changement de monde autant utopique que recélant des dangers énormes), le tout dans le respect de la dignité humaine.
Mais, pour que cela marche, il faut un personnel politique à la hauteur de la tâche.
Et, pour l’avoir, il faut aussi que les populations soient à la hauteur de la leur.
Car, au lieu de prendre le réformateur pour le bouc-émissaire de tout ce qui va mal, il conviendrait plutôt d’accompagner les réformes nécessaires et indispensables avant que les faits nous obligent à leur obéir avec ce temps de retard qui peut ne jamais être rattrapé.
Oui, les civilisations meurent mais aussi les espèces vivantes.
Ne soyons pas l’une d’elles.
De notre propre faute.