Les Actualités sur www.ecoinfosmonde.com

mardi 15 juillet 2014

L’EDITORIAL D'ALEXANDRE VATIMBELLA. Le Brics en passe d’être contrôlé par la Chine

La banque d’investissement du Brics ainsi qu’un fonds de réserve de change vont peut-être enfin voir le jour après des années d’atermoiements lors de la réunion actuelle de ses membres (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) au Brésil.
Ces deux institutions sensées démontrer la puissance économique de ce club hétéroclite et sans réel cohésion, auraient déjà du voir le jour il y a longtemps mais les réserves politiques et les peurs économiques l’ont toujours emporté jusqu’à présent sur des réalisations concrètes.
Car, au-delà d’un club qui mêle les torchons de la croissance (Russie et Afrique du Sud) et les serviettes (Brésil, Inde, Chine), les démocraties (Brésil, Inde, Afrique du Sud) et les régimes autoritaires, voire plus (Russie, Chine), les ennemis d’hier et d’aujourd’hui, voire de demain (Russie/Chine, Chine/Inde), tout ce beau monde ne se fait guère confiance et ne voulait pas, jusqu’à présent, tomber sous la coupe du véritable patron du Brics, la Chine, dont l’intérêt pour ce club vient plutôt d’une volonté d’être le leader des antioccidentaux que d’aider ses «partenaires» au-delà de leur vendre ses produits et de se fournir en matières premières indispensables à son développement chez eux.
Reste que la situation actuelle pourrait bien modifier la donne et emporter les dernières réticences de l’Inde et du Brésil, sans parler de la Russie qui a décidé de jouer la carte chinoise contre celles des Etats-Unis et de l’Union européenne (rappelons que la présence de l’Afrique du Sud dans ce club est un anachronisme qui vient uniquement de la volonté de compter un pays africain parmi ses membres).
Car le temps presse, les croissances du Brésil, de l’Inde, de la Russie et de l’Afrique du Sud sont en berne alors que celle de la Chine, certes en baisse, demeure encore élevée.
Et c’est ce qui fait que la Chine – qui sera le plus grand contributeur du fonds de réserve de change et qui accueillera à Shanghai le siège de la banque d’investissement – est en bonne position afin de rafler la mise en prenant sous sa coupe ce club soi-disant entre pays égaux, la Chine étant manifestement un petit peu plus égale que les autres…
Toujours est-il que si les accords sont actés et que le tout est suivi d’une mise en œuvre concrète, qui a fait défaut jusqu’à maintenant, des deux institutions, il est évident que le Brics deviendrait plus que jamais un outil dans les mains du pouvoir chinois.
Au vu de la situation économique et politique qui fait de la Chine désormais la deuxième puissance économique et sans doute la première dans peu de temps (en terme de PIB global) ainsi qu’une puissance politique qui pourra concurrencer les Etats-Unis, ce contrôle de Pékin sur le Brics n’est guère surprenant d’autant que les autres membres du club connaissent des situations économiques mais aussi politiques délicates.
Pour autant, il est légitime de se demander combien de temps pourra durer ces institutions, notamment si le Brésil et surtout l’Inde retrouvent dans les années à venir des taux de croissance au-delà des 5% pour le premier et proche de 8%-9% pour la seconde.
De plus, ces deux institutions seront viables si d’autres pays lui font confiance.
On peut penser que ce sera le cas de beaucoup de pays africains qui vivent de plus en plus sous perfusion chinoise mais les pays asiatiques, champions de la croissance comme l’Indonésie ou le Vietnam, risquent d’avoir énormément de mal à travailler avec ce qu’ils considéreront, à juste titre, comme des outils de la puissance de la Chine, pays pour qui ils ont bien des réserves …
Alexandre Vatimbella
© 2014 LesNouveauxMondes.org


dimanche 13 juillet 2014

LE FOCUS. Le centriste Obama a bien réformé l’Amérique

L’«Obama bashing» est devenu un sport national aux Etats-Unis.
Il permet à tous les frustrés de son action de déverser leur fiel sur celui-ci alors qu’il ne lui reste plus que deux ans à passer à la Maison Blanche et qu’il est déjà considéré, aux yeux des médias, comme un «lame duck», un président qui est en bout de course et sans plus aucune chance de faire passer ses projets de loi, ni même de peser sur le débat politique.
L’extrême-droite du Tea Party et la droite radicale du Parti républicain ont toujours été dans la critique systématique du premier président noir du pays.
Tout comme l’extrême-gauche et la gauche radicale du Parti démocrate qui a attaqué dès le départ son discours consensuel.
En revanche, les démocrates modérés ont été pendant longtemps dithyrambiques, tout comme l’ont été les médias pendant les trois premières années de sa présidence et lors de la réélection.
Or, désormais, les premiers sont très critiques et les autres, tel un troupeau de mouton, rivalisent à celui qui pourra être le plus dur sur ce président qu’ils ont tellement encensés que c’en était indécent, tout comme le sont les critiques systématiques d’aujourd’hui.
Quant aux Américains, leur jugement est plus nuancé si l’on décortique l’ensemble des sondages mais il est clair qu’ils sont aussi dans une défiance que l’on peut qualifier de globalement injuste.
Car – et les politologues sérieux s’accordent sur cette réalité – Barack Obama, qu’on le veuille ou non, restera dans les livres d’histoire comme un président qui a entrepris de grandes réformes, au même titre qu’un Lyndon Johnson dans les années soixante, et non celui dépeint actuellement par ce dénigrement outrancier comme un homme incapable de prendre une décision ou de faire passer une mesure, qui plus est, velléitaire et pusillanime en matière de politique étrangère.
Cette vision est d’ailleurs tellement incohérente que les adversaires du président américaine doivent constamment jongler entrer les reproches d’avoir trop agi et ceux de n’avoir rien fait!
Car, de la loi sur l’assurance-santé au recouvrement de l’indépendance énergétique du pays en passant par les mesures contre le réchauffement climatique, les mesures  économiques qui ont permis au pays de ne pas sombrer dans une dépression encore plus grave que celle des années 1930 avec, à la clé, une réforme du système financier, le sauvetage de nombre d’entreprises en grande difficulté et un nombre important de créations d’emplois, par les mesures pour réformer le système scolaire ou encore par la fin de la guerre en Irak et bientôt de celle d’Afghanistan, sans oublier l’élimination de Ben Laden, le bilan actuel de Barack Obama est impressionnant.
Et l’on ne parle pas de sa volonté de continuer les réformes nécessaires comme celles de l’immigration, de la fiscalité ou du port d’arme qui ne peuvent aboutir face au blocage total du Congrès par les républicains.
Bien évidemment, toutes ces réformes et ces mesures n’ont pas été parfaites parce que, par exemple, une réforme n’est pas réductible à un instant T mais doit être appréciée dans le temps avec ses ajustements et parce que, plus profondément, aucune ne réforme ne l’est jamais totalement.
Mais l’Affordable care act, la loi sur l’assurance-santé, est une réussite globale que plus personne ne peut plus remettre en cause sauf en diatribes politiciennes qui n’auront in fine que peu de conséquences sur son existence quelle que soit la majorité au Congrès en novembre prochain après les «midterm elections», les élections de mi-mandat qui pourraient voir les républicains majoritaires à la Chambre des représentants ainsi qu’au Sénat.
Cela dit, il est évident que le positionnement centriste d’Obama est, en partie, responsable de ses déboires politiques actuels.
En voulant travailler avec tout le monde, en ayant proposé des mesures «bipartisanes», en ayant rejeté toutes les mesures extrémistes d’un bord ou de l’autre, en ayant développé un discours de rassemblement, il s’est aliéné tout ce que les Etats-Unis comptent de clientélismes, tant au Parti républicain qu’au Parti démocrate.
Dans l’histoire politique des démocraties, il est loin d’être le seul à avoir connu des attaques virulentes des deux bords de l’échiquier politique en voulant gouverner avec le principe centriste du juste équilibre ou, en tout cas, avec la préoccupation de servir l’ensemble de la population et non pas une clientèle.
Ce fut le cas, entre autres du président américain Theodore Roosevelt ou du président du conseil français Aristide Briand.
On peut aussi observer la même hostilité à des politiques qui ont voulu gouverner au centre comme Valéry Giscard d’Estaing, Tony Blair ou Mario Monti.
Certains ont réussi à passer entre les gouttes de la haine, tel Bill Clinton qui a du quand même affronter une procédure de destitution menée par les républicains ultras.
Quoi qu’il en soit, Barack Obama demeurera comme un président qui a voulu réformer les Etats-Unis en en (re)faisant une république démocratique où les «opportunities» (opportunités de réussir) seraient la base d’une véritable méritocratie, tout en mettant en place un système qui garantirait une égalité des chances avec un école plus efficace, un système de santé plus rationnel et un système fiscal plus juste.
Il faut espérer que dans les plus de deux ans qui lui restent à diriger la première puissance du monde, il soit capable de trouver les majorités afin de peaufiner le travail déjà accompli.
Non pas pour lui, non pas pour le Centre mais pour les Etats-Unis et la planète toute entière.

Alexandre Vatimbella
copyright 2014 LesNouveauxMondes.org 

mardi 1 juillet 2014

L’EDITORIAL D’ALEXANDRE VATIMBELLA. De la démocratie en Chine

Les dirigeants chinois, à travers les âges, ont toujours eu peur de leur peuple, que ce soit les empereurs ou, aujourd’hui, les chefs du Parti communiste.
Et ils ont toujours affirmé que le seul moyen de gouverner ce pays a priori ingouvernable était de le faire d’une main de fer pour le bien de ses habitants.
Le choix de Deng Xiaoping de privilégier le développement économique contre la démocratisation du régime, surtout après les événements sanglants de la place Tienanmen en 1989 semble avoir scellé le sort de la démocratie «à l’occidentale» pour très longtemps d’autant que le nouveau maître de la Chine, Xi Jinping, va plutôt rechercher ses références en matière de liberté du côté de Mao, grand dictateur sanglant devant l’éternel…
Et cette vision que la démocratie n’est pas faite pour la Chine a été reprise a maintes reprises par nombre – mais pas tous – fameux sinologues occidentaux, «experts» et «spécialistes», qui se pressent dans les conférences et les plateaux télés.
Selon eux, la «culture chinoise» ne serait pas soluble dans la démocratie.
Plus, les Chinois eux-mêmes, ne souhaiteraient pas la démocratie.
La fronde qui se déroule depuis plusieurs semaines à Hongkong rappelle que la «culture chinoise» est bien compatible avec la «démocratie à l’occidentale» (dont je préfère la véritable appellation: démocratie!).
Et, surtout, que les Chinois (à moins que ceux de Hongkong n’en soient pas vraiment…) veulent ardemment un régime démocratique comme le montre le succès éclatant du référendum citoyen officieux organisé afin de réclamer un vote libre afin de désigner le prochain leader du territoire et que Pékin s’est empressé de déclare «illégal», évidemment.
D’ailleurs, un sondage réalisé il y a quelques mois et paru étonnamment dans un quotidien du régime (mais à tirage limité et en anglais) montrait qu’une énorme majorité des Chinois demandaient la démocratie.
Bien sûr, dans un pays où les libertés de tous ordres sont contrôlées depuis si longtemps, l’établissement d’un régime démocratique doit être fait progressivement afin d’éviter une implosion qui peut être bien réelle, au-delà même des aspirations à l’indépendance du Tibet ou du Xinjiang.
Un Cantonais, un Pékinois et un Shanghaïen ne se sentent pas toujours de la même communauté.
Et ces trois là ont souvent une hostilité vis-à-vis des habitants des provinces pauvres dont ils ne se sentent absolument pas solidaires.
Ayant dit cela, la voie vers la démocratie en Chine doit commencer immédiatement par de grands gestes (libération de tous les dissidents et de tous les défenseurs des droits de l’homme et de la démocratie) et de grandes réformes, en particulier avec l’instauration d’un régime juridique qui garantit les droits des citoyens et les protège de l’arbitraire des responsables nationaux et locaux.
Et tous les démocrates et tous les pays démocratiques doivent être solidaires avec ces dizaines de milliers de participants à cette grande manifestation pour la démocratie qui se déroule ce 1er juillet à Hongkong malgré les menaces des communistes.
Malheureusement, on en est bien loin, commerce et géopolitique obligent.
Alexandre Vatimbella

© 2014 LesNouveauxMondes.org