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vendredi 21 juillet 2023

L’Editorial Alexandre Vatimbella. De l’information en démocratie

L’information des citoyens en démocratie repose sur deux piliers qui peuvent être en concurrence voire même en opposition frontale.

Le premier est celui qui consiste à apporter à l’individu l’information qui lui donne la capacité de comprendre le monde donc de lui permettre d’exercer au mieux ses droits et devoirs de citoyen, de défendre et protéger ses intérêts: c’est le droit à l’information.

Le second est celui qui donne à la liberté de pensée donc d’avoir une d’opinion et de pouvoir la communiquer grâce à la la liberté d’expression et plus particulièrement grâce à la liberté de la presse, afin de permettre à tous les courants de pensée de pouvoir s’exprimer dans le cadre des lois de la république (qui doivent punir tout excès de cette liberté comme la diffamation, l’appel au meurtre et à la violence contre les personnes): c’est le droit à exprimer publiquement ses opinions.

On comprend quel choc frontal peut avoir lieu entre le droit à l’information et le droit à exprimer ses opinions.

Dans le premier cas, la rectitude dans la narration des faits est essentielle et prime sur leurs interprétations; dans le second c’est l’interprétation de ces faits qui est à l’objectif premier afin de leur donner un sens en rapport avec une idéologie particulière.

Bien entendu, il est tout à fait possible que l’opinion s’appuie sur une narration au plus près de la réalité des faits mais il n’en reste pas moins que la presse partisane privilégie d’abord des grilles de lectures idéologiques particulières.

Il faut donc prendre en compte cette dichotomie de l’information.

Pour cela, il convient de mettre en place un régime hybride de l’information qui garantit au citoyen, d’une part, d’avoir accès à une information la plus objective possible et, d’autre part, de pouvoir créer et/ou consulter un média qui défend ses opinions.

Il faut donc qu’il y ait des organisations qui donnent de l’information et l’expliquent le plus objectivement possible et d’autres qui commentent l’information avec des points de vue idéologiques différents.

S’il n’existe pas de régime dual alors il ne peut y avoir de réelle démocratie.

Certains diront que ce régime hybride existe dans la plupart des démocraties de la planète où coexistent un service public de l’information et une presse libre.

Mais, en réalité, il n’existe pas vraiment de service public de l’information réellement indépendant et dont le travail est guidé par l’objectivité.

C’est là qu’il faut agir sans pour autant mettre en péril la presse d’opinion.

 

Alexandre Vatimbella

 

mercredi 19 juillet 2023

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. La raison démocratique au défi de l’émotion populiste

Comment gouverner rationnellement quand c’est l’irrationnel qui domine souvent les gouvernés?

Telle est la question que se sont posés philosophes et penseurs depuis Aristote.

Une politique de raison se heurte souvent à l’émotion populaire.

Dès lors, en démocratie, là où les représentants du peuple et les gouvernants ont besoin d’être élus, jouent souvent la carte de l’émotion, certains la pratiquant à outrance.

Ces dernières décennies on assiste même à un développement exponentiel de l’émotivité où toute mesure, toute décision, toute réaction passe le test de l’affectivité en même temps que celui de sa pertinence dans son domaine d’intervention.

L’émotion n’est plus seulement présente dans les faits divers ou les catastrophes, les exploits sportifs ou dans les événements de la culture populaire, elle régente aussi les comportements, les pensées et les jugements de toute la sphère politique.

Prenons l’exemple du «ressenti» de la population qui est mis en avant dans les sondages.

Celui n’est évidemment pas fondée sur la réalité mais sur un sentiment qui produit une croyance

Alors que les économies américaine et française connaissent actuellement des résultats positifs et sont en croissance, une grande majorité des sondés pensent le contraire.

Plus irrationnel encore sont les enquêtes qui montrent que les populations estiment majoritairement que la situation de leur pays est mauvaise mais affirment encore plus majoritairement que leur situation personnelle est bonne!

Au-delà de ce dernier paradoxe, on pourrait multiplier les exemples où un sentiment prend le pas sur la réalité que ce soit en matière de sécurité, de protection sociale, de pouvoir d’achat, etc.

Les populismes l’ont d’ailleurs bien compris qui font reposer l’essentiel de leurs programmes sur l’émotion négative et qui fustigent la raison comme si elle était responsable de tous les maux de la société.

Et pour ne pas être en reste, les partis dits de gouvernement utilisent souvent l’émotion sachant que celle-ci est plus facile à susciter que de faire appel à la raison.

Un peu de populisme n’est-il pas bon électoralement parlant?!

Mais si les émotions ne doivent pas vampiriser la politique, la raison ne doit pas pour autant les empêcher systématiquement.

Celles-ci nous permettent d’avoir de l’empathie pour les autres et les causes humanistes.

Elles sont à la base de nombre de politiques sociales et sociétales qui ont permis d’améliorer le sort de la population et/ou de personnes et/ou groupes particuliers.

Elles ont toujours existé dans le champ politique.

Néanmoins, les émotions négatives ont pris une dimension sans doute jamais vue et ce depuis le début de ce troisième millénaire avec les «indignations», les «colères», les «ressentiments», les «humiliations» vraies ou fausses, suscitées ou récupérées avec gourmandise par les populismes et les extrémismes sur fond d’«injustices», de «discriminations» ou d’«inégalités» elles aussi vraies ou fausses, suscitées ou récupérées afin de mener un contestation de l’ordre démocratique.

Ajoutons que celles-ci sont de plus en plus souvent liées à des groupes sociaux, sociétaux ou culturels, à des communautarismes.

Si elles ont évidemment le droit de citer dans une démocratie républicaine libérale au nom de la liberté de pensée donc d’opinion et d’expression, elles devraient néanmoins ne pas interférer dans la phase finale de la prise de décision politique.

Dès lors est-il encore possible que la raison l’emporte sur l’émotion quand il s’agit pour la population d’apprécier des mesures politiques ou de faire un état des lieux d’une situation précise?

La réponse est qu’actuellement, ça l’est de moins en moins.

Et les nouveaux moyens de communication avec internet et les réseaux sociaux en pointe nous éloignent encore plus de cet objectif avec leur déversement de fake news et d’élucubrationismes (complotismes) sur lesquels l’émotion négative est de plus en plus assise ou justifiée.

D’autant qu’il est plus facile pour les politiques et plus encore pour les politiciens populistes démagogues surtout s’ils propagent des idéologies extrémistes, de jouer et de capitaliser sur les émotions que de convaincre par la raison et la réalité.

Et cela a déteint sur toute la sphère politique.

Ainsi l’absence d’émotion de la part d’un élu est critiquée et stigmatisée alors que l’absence de raison est souvent pardonnée au nom des nécessaires empathie et sympathie, d’une demande de l’«opinion publique» qu’il soit proche de la peine des autres.

Comment faire en sorte dès lors que la raison sorte vainqueure de ce bras de fer continuel avec l’émotion sans pour autant la supprimer lorsqu’elle est un moteur pour un progrès.

Le rôle des élus n’est-il pas aussi de traduire les émotions du corps social en raison politique, c’est-à-dire à prendre en compte l’émotionnel pour gouverner le plus raisonnablement possible et non être dans la réaction affective comme c’est de plus en plus souvent le cas?

Mais est-ce seulement possible?

La «dérive «émotionnelle» de la politique est préoccupante parce qu’elle permet à l’irrationnel d’interférer largement dans les débats, voire de les phagocyter.

Mais si l’on ne peut l’empêcher de progresser, peut-on l’«encadrer»?

On ne peut malheureusement répondre positivement à cette question tellement les émotions avant tout négatives parasitent désormais la démocratie à tous les niveaux de décision.

Seule manière d’agir efficacement, la formation et l’information de l’individu pour en faire un citoyen «au courant» et responsable dont la demande sera que le politique s’occupe de politique et pas des plaies de l’âme.

Car la place de l’émotion dans la politique est aussi la résultante de cette autonomisation irresponsable, égocentrique et assistée de l’individu qui demande que ses élus soient aussi des sortes de psychothérapeutes qui, non seulement, l’écoutent mais le soignent en accédant sans frein à ses envies et ses désirs.

Parce que si l’émotion a pu prendre autant d’importance dans la sphère politique, c’est aussi à cause d’un monde que l’individu maîtrise de moins en moins, donc qui provoque chez lui de l’angoisse et du stress.

Il compense alors cette absence de compréhension par des réactions épidermiques et émotionnelles en les justifiant par toutes les fake news et les théories du complot qui flottent dans l’air vicié des réseaux sociaux.

L’émotion est bien devenue une composante de la gouvernance de la cité.

Et l’on ne voit pas comment les émotions négatives ne pourraient pas encore progresser au risque de faire imploser l’ordre démocratique.

Peut-être en s’inspirant de Spinoza qui écrit, à propos de ces dernières qu’«un sentiment ne peut être contrarié ou supprimé que par un sentiment contraire et plus fort que le sentiment à contrarier».

Selon lui une émotion positive induite par la raison, c’est-à-dire par un effort intellectuel, peut contrecarrer une émotion négative issue souvent de la paresse de la pensée.

Reste qu’il nous dit sans détour que «la liberté n’est qu’à celui qui de son entier consentement vit sous le seule conduite de la Raison».

 

Alexandre Vatimbella

 

mardi 18 juillet 2023

Le Focus. Modi rend-il l’Inde infréquentable?

L’émoi des visites de Modi aux Etats-Unis puis en France où, à chaque fois, que ce soit Joe Biden ou Emmanuel Macron, on déroule le tapis rouge au premier ministre indien est compréhensible, l’homme étant un populiste démagogue, proche des extrémistes hindous dont il a couvert les crimes contre les musulmans au temps où il gouvernait la province du Gujarat.

Mais il est aussi à la tête d’une démocratie – certes imparfaite mais une démocratie sans conteste – et d’un pays qui compte désormais la plus grande population et qui doit, dans le monde troublé d’aujourd’hui, absolument demeurer dans une «neutralité» face aux régimes de Poutine en Russie et de Xi en Chine.

Rappelons que les liens entre l’Inde et la Russie sont anciens, datant des premières années de l’indépendance du pays avec une a        ide militaire importante de l’Union soviétique.

Dès lors, sa position est ambigüe mais elle n’a pas choisi clairement le soutien à Poutine ce qui est déjà une victoire pour le camp des démocraties.

Très hypothétique, en revanche, est la possibilité d’un alignement avec la Chine tant les points de frictions sont importants et la peur de l’Inde est grande d’être réduite par son puissant voisin à une puissance régionale de second ordre, voire à un simple satellite de celui-ci.

Toujours est-il que l’Inde a toujours été un pays qui compte géopolitiquement et géo-stratégiquement, elle l’est encore plus en ces temps troublés.

Dès lors, ne pas vouloir l’attirer dans le camp du monde libre quel que soit son premier ministre serait une faute pour n’importe quel gouvernement français, américain, britannique, allemande ou autre.

Cela n’empêche pas que les préventions et les indignations de la société civile de ces pays soient respectées et respectables face à la politique autocratique de Modi et à ses débordements.

Cependant que dirait-on si, demain, l’Inde choisissait carrément le camp de la Russie de Poutine parce que celui de la démocratie n’aurait pas fait le nécessaire afin qu’elle en soit membre?

L’alliance avec l’Inde est une illustration emblématique de la realpolitik avec Modi à sa tête tout en demeurant acceptable du fait de son régime démocratique.

lundi 3 juillet 2023

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. La dignité humaine doit définitivement primer sur le pouvoir du peuple

«La dignité de la personne humaine n'est pas seulement un droit fondamental en soi, mais constitue la base même des droits fondamentaux»

(Déclaration universelle des droits de l'humain)

 

Dans l’esprit du grand public, les différentes déclarations des droits humains se focalisent sur la liberté, l’égalité et, éventuellement la fraternité.

Mais on oublie qu’elles parlent aussi de ce qui est l’exigence même de la possibilité de l’exercice de cette liberté, de cette égalité et de cette fraternité: la dignité de chaque être humain.

Sans elle, ces droits demeurent virtuels, de beaux mots sans réalité concrète.

Non seulement, tout être humain a le droit d’être respecté mais ce respect est essentiel dans une démocratie républicaine.

Ce que l’humain demande qu’on respecte en lui c’est sa dignité.

Respecter sa dignité c’est respecter son individualité, ce qu’il est.

Le socle légitimaire de la démocratie du 21e siècle ne devrait plus être le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple mais le respect de la dignité humaine.

La dignité est une prérogative inaliénable dont doit absolument jouir toute personne qui lui vaut considération et respect en tant qu’être humain.

Ce que cela changerait est fondamental car, dès lors, que la reconnaissance de la dignité de l’être humain et son respect deviendraient la pierre angulaire du régime démocratique, c’est-à-dire qu’il serait réellement considéré comme un citoyen égal à un autre, cela signifierait que personne n’aurait la possibilité et le droit – même pas le pouvoir du peuple – de remettre en question sa liberté et la solidarité à laquelle il a le droit dans sa communauté.

Plus qu’un droit constitutionnel, ce serait le prémisse de toute constitution qui ne pourrait être démocratique que si toute son architecture en découle.

Ainsi, qu’il fasse partie de la majorité ou de la minorité politique, grâce à cette reconnaissance inaliénable de sa dignité, aucune autorité, aucun groupe n’aurait la légitimité à lui supprimer ses droits fondamentaux.

Concrètement, ces droits découlent des valeurs humanistes qui lui garantissent le respect de son individualité et impose à la communauté un devoir de solidarité pour qu’il puisse vivre une existence digne.

Bien entendu, il n’est pas question de remettre en cause et encore moins de supprimer le vote des représentants du peuple par le peuple et que le gouvernement demeure celui du peuple pour le peuple dans la démocratie républicaine représentative et participative.

Il s’agit seulement d’affirmer haut et fort que ce régime a un but beaucoup plus élevé, celui d’assurer à chacun sa dignité d’humain.

Et que par voie de conséquence, rien ni personne ne peut lui supprimer les attributs de cette dignité donc sa liberté, son égalité et la solidarité de sa communauté.

Car n’oublions jamais que lorsqu’on refuse à quelqu’un sa dignité, on le nie comme humain, on ne le respecte plus et on peut user de la violence à son encontre jusqu’aux pires forfaitures de l’Histoire, du racisme à l’antisémitisme avec des génocides à la clé comme en Allemagne vis-à-vis des Juifs, en Turquie vis-à-vis de Arméniens, au Rwanda vis-à-vis des Tutsis.

Alexandre Vatimbella