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jeudi 6 novembre 2008

CHINE-INTERNATIONAL. La présence de la Chine en Afrique est essentiellement économique


Lors d’un séminaire organisé par Sciences Po Paris, l’analyse de la politique de la Chine vis-à-vis de l’Afrique a fait ressortir que celle-ci est avant tout mue par la volonté de s’assurer la fourniture de matières premières et d’exporter sur les marchés des pays du continent noir sa production, sans oublier l’établissement de nombreux Chinois qui pose des problèmes d’assimilation.


Après la révolution communiste, la présence de la Chine en Afrique fut avant tout dictée par des préoccupations géostratégiques guidées par la volonté de trouver des alliés politiques et de tenter d’exporter la révolution prolétarienne. Une présence qui fut plus de prestige qu’autre chose. La nouvelle présence chinoise qui date des années 1980, au moment où Deng Xiaoping libérait l’économie chinoise, a une toute autre nature : prendre pied commercialement sur le continent noir à la fois pour se fournir en matières premières mais aussi pour exporter sa production. Telles sont les principales conclusions d’un séminaire qui s’est tenu à Paris, organisé par le CERI (Centre d’études des relations internationales) de Sciences Po. Mais cette présence est beaucoup plus sélective qu’on le croit généralement. Ainsi, comme le rappelle le professeur Roland Marchal de Sciences Po, « 80% des échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique a lieu avec dix à quinze pays sur les cinquante-trois que compte le continent ». Cette présence n’a pas de logique « néocolonialiste » comme l’a expliqué Chris Alden, professeur à la London School of Economics : « La Chine n’a pas d’idéologie à exporter, pas de territoires à conquérir, il n’y a qu’une volonté de commercer. » Reste que tout n’est pas aussi rose entre la Chine et l’Afrique car la volonté hégémonique en matière économique commence à créer de sérieux problèmes entre Chinois et Africains : personnels d’entreprises chinoises enlevés ou tués de l’Ethiopie au Soudan en passant par le Nigéria et l’Angola, installations industrielles vandalisées ou détruites, la Chine fait la douloureuse expérience d’une présence jugée trop agressive et peu amicale par beaucoup d’Africains. D’autant que la Chine ne fait pas que commercer, elle envoie aussi des migrants et l’assimilation entre Chinois et Africains posent de très nombreux problèmes.

Pour Ricardo Soares de Oliviera de l’Université d’Oxford, « la présence de la Chine en Afrique est vite devenue le contraire d’une présence libérale, d’aide et de développement aux pays où elle s’est installée et c’est surtout vrai en matière de pétrole ». Mais, néanmoins, la Chine a conquis les élites gouvernementales en proposant ce que l’on appelle parfois le « modèle Elf-Acquitaine », du nom de la politique africaine suivie par l’ex-compagnie pétrolière publique française rachetée depuis par Total. Ce modèle se caractérise par la facilité d’obtenir des prêts auprès de la Chine de la part des pays africains qui commercent avec elle, la signature de « package deals », c’est-à-dire de contrats qui englobent toute une série de liens commerciaux ainsi que la construction d’infrastructures et, bien sûr, le versement de « commissions » aux autorités des pays concernés… Reste que même là, selon Roland Marchal, un rejet se fait jour. Ainsi, en Angola, le gouvernement a déclaré « ne pas vouloir devenir la station-service de Pékin ». Néanmoins, la Chine commence à faire des efforts pour mieux comprendre l’Afrique et développe les études africaines dans ses universités. Dès lors, l’Afrique pourra peut-être espérer que les sollicitudes chinoises soient plus profondes que les fastes du fameux sommet sino-africain de Pékin en 2006 où la Chine avait reçu quasiment tous les pays du continent noir pour des festivités grandioses.


Alexandre Vatimbella

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