Les Actualités sur www.ecoinfosmonde.com

dimanche 11 novembre 2012

L’EDITORIAL D’ALEXANDRE VATIMBELLA. Les nouveaux dirigeants chinois seront-ils capables de conduire le pays vers un avenir radieux?

La Chine devrait devenir la première puissance économique de la planète en 2016 selon une prévision de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique). Attendons encore quatre ans pour savoir si celle-ci serait une réalité.
Pour l’instant, les dirigeants chinois s’occupent de leur congrès, le dix-huitième du nom qui est celui de la passation de pouvoir d’une génération (celle de Hu Jintao et de Wen Jiabao) à une autre (celle de Xi Jinping et Li Keqiang qui remplaceront les premiers nommés à la têtte du Parti communiste et de l’Etat).
Rien d’imprévu ne devrait survenir dans le Palais du Peuple où se déroule cette réunion. Tout est prévu et policé pour que cette transition se fasse sans accros.
Mais ce qui est intéressant pour la Chine ainsi que pour le reste du monde, c’est que ce congrès intervient à un moment-clé pour le pays tant en matière politique que sociale, économique, sociétale et diplomatique.
- Politique: La démocratisation de la Chine n’a guère avancé ces dix dernières années sous le règne de Hu Jintao et Wen Jiabao. Et la population commence à trouver le temps long car, comme prévu, le développement économique et la montée en puissance d’une classe moyenne qui en a résulté, a produit une demande de démocratie et de liberté qui n’a pas été prise en compte.
Pire, l’état de droit est encore une notion très relative en Chine. Elle ne s’applique que quand les maîtres du Parti communiste en ont envie ou à l’encontre des étrangers (notamment des sociétés) pour leur mettre des bâtons dans les roues, voire les spolier…
Le petit peuple qui manifeste de plus en plus son mécontentement et continue à pétitionner (une pratique ancestrale), n’a pratiquement aucune chance de se faire entendre sauf cas rarissimes et souvent parce que le pouvoir n’a pas pu étouffer ces derniers à temps.
De leur côté, nombre de ceux qui ont profité de l’expansion économique pour faire fortune quittent ou veulent quitter la Chine pour s’installer dans des pays où la stabilité politique et juridique leur permettra de vivre en sécurité avec leur famille.
Va-t-on vers une libéralisation du régime dans les cinq ou dix à venir avec Xi Jinping et les dirigeants qui vont l’entourer au bureau politique du PCC? Bien malin qui pourra répondre avec exactitude car toutes les thèses circulent à ce sujet, d’une vraie démocratisation à une fermeture encore plus forte!
- Economique: L’économie chinoise va-t-elle s’effondrer sous le poids des problèmes structurels et de ses dysfonctionnements graves ou va-t-elle être capable de repartir de plus belle, c’est l’interrogation numéro un en ce moment.
Tout concoure à penser que le système productif chinois est à bout de souffle et n’est maintenu en l’état que par des dépenses publiques et des crédits aux grandes entreprises d’Etat.
Pourtant, la croissance demeure forte, les exportations ont l’air de repartir et un certain nombre d’indicateurs économiques semblent s’améliorer en cette fin 2012.
Evidemment, les statistiques chinoises sont peu crédibles mais la situation ne parait pas aussi catastrophique que le disent nombre d’experts.
Est-ce une rémission avant une chute encore plus forte, la question est posée quand on regarde l’endettement des provinces, les crédits bancaires qui ne seront jamais remboursés, les dépenses inutiles en infrastructure de l’Etat pour soutenir la machine économique, le marché immobilier qui continue à tanguer et une consommation intérieure qui n’est pas à la hauteur des espoirs des économistes.
- Social: Le climat social de la Chine est inquiétant et l’on est loin de l’«harmonie sociale» souhaitée par le PCC mais il ne semble pas pour autant que l’on soit proche d’une explosion sociale comme le redoutent les dirigeants et certains analystes.
Certes, les chefs du PCC lisent et relisent «L’Ancien régime et la Révolution» d’Alexis de Tocqueville pour comprendre comment un système fermé et incapable de se réformer pour prendre en compte les désidératas de sa population a engendré une révolution aussi forte mais l’effondrement n’est pas un scénario à court terme.
En revanche, la montée constante des inégalités, toutefois tempérée ces derniers temps par des hausses de salaires importantes, ne pourra par continuer de la sorte indéfiniment.
Comme la corruption à tous les niveaux de l’Etat et du Parti communiste qui engendrent des ressentiments et une colère puissante dans la population même si celle-ci est, pour l’instant, plus fataliste que prête à prendre des Bastilles.
- Sociétal: C’est certainement dans ce domaine que les Chinois sont le plus satisfait. La société civile chinoise se développe de manière assez libérale et permet, quand on ne s’aventure pas sur le terrain politique, de vivre sa vie plus ou moins comme on veut et de bénéficier de nombreuses opportunités.
Reste que plus la société avancera, plus ses membres auront des demandes qui iront de pair avec une libéralisation politique. C’est là le danger pour le pouvoir autoritaire de Pékin.
- Diplomatique: La politique de «gros bras» de la Chine vis-à-vis de ses voisins et ses accès de nervosité et d’agressivité ont terni énormément son image dans le monde entier, faisant de la volonté affichée de Pékin de mettre en avant prioritairement son soft power une illusion à laquelle plus personne ne croît sérieusement.
La constante augmentation du budget militaire n’est pas fait, non plus, pour calmer les inquiétudes de pays comme l’Inde, le Japon, le Vietnam, les Philippines et quelques autres qui se tournent vers les Etats-Unis pour endiguer la montée en puissance de l’arsenal chinois.
En outre, que ce soit en Afrique, en Amérique latine ou ailleurs, plus personne ne se fait d’illusions sur la volonté de la Chine de défendre avant tout ses propres intérêts et non ceux de pays en développement ou émergents comme une grande sœur.
Après ce tour d’horizon rapide, il est évident que la Chine est devant des choix importants pour son avenir. Y aura-t-il un dirigeant qui sera le Deng Xiaoping de la libéralisation politique intelligente? Peu de personnes pensent que Xi Jinping, le nouveau numéro un du pays sera celui-là. Si cette prédiction s’avère juste, alors la Chine va encore prendre du retard dans ce domaine là pendant dix ans (les deux mandats de cinq ans qui sont généralement donnés au secrétaire général du Parti communiste et président de la république).
A moins que des événements précipitent le cours de l’Histoire…
Alexandre Vatimbella
© 2012 LesNouveauxMondes.org