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mercredi 21 mai 2014

L’EDITORIAL D’ALEXANDRE VATIMBELLA. Russie-Chine, une alliance contre-nature et de circonstance face à la démocratie

Quand les dictateurs et les dirigeants autoritaires sont aux aboies, ils ont tendance à s’unir face à aux démocraties et à sortir leurs anathèmes et à montrer leurs muscles.
Telles sont, à nouveau, les postures de la Chine et de la Russie qui, avec Xi Jinping et Vladimir Poutine et comme au bon vieux temps de la Guerre froide, se serrent les coudes face à l’Occident et aux revendications démocratiques de leurs propres peuples, elles qui sont déjà des partenaires dans le club moribond des grands émergents, le Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
Mais voilà bien une alliance contre-nature qui doit faire bondir tous les observateurs avertis des deux pays.
Car la grande peur ancestrale de la Russie, ce n’est pas l’Occident ou même la perte de sa sphère d’influence à l’Ouest, mais bien la Chine, son milliard et demi d’habitants (alors que la population russe n’en finit pas de baisser), ses revendications territoriales ancestrales à sa frontière extrême-orientale ainsi que sa nouvelle puissance économico-politico-militaire.
Et la Chine se méfie de cette Russie expansionniste qui a asservi tous ces peuples dans feue l’Union soviétique que Vladimir Poutine veut faire revivre d’une manière ou d’une autre.
Dès lors, voir les deux pays faire des déclarations communes face à l’Occident rappelle que Staline et Mao, déjà, maniaient la rhétorique antidémocratique tout en se méfiant l’un de l’autre au plus haut point.
C’est tellement ahurissant de voir la Chine se taire sur les agissements de la Russie en Ukraine, elle qui est terrorisée que la communauté internationale se mobilise sur l’indépendance du Tibet ou du Xinjiang et qui brandit la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un pays comme une règle intangible et absolue.
Bien évidemment les apprentis dictateurs comme Poutine ou Xi ne sont pas à une contradiction près quand il s’agit de se battre contre leur ennemi mortel, la liberté.
On voit bien la similitude dans le combat contre ceux qui demandent un régime démocratique réel que ce soit en Russie et en Chine.
Non pas ceux qui nous rabâchent les «spécificités» de chacun des deux pays pour affirmer qu’il faut une «démocratie à la chinoise» ou «une démocratie à la russe» dont le point commun serait de nier les droits de l’individu et les valeurs de la personne au nom d’une vision holistique soi-disant «historique».
Heureusement que les dissidents qui peuvent parler avant d’être envoyés dans les camps chinois et russes ou après en être sortis, affirment l’inanité d’une telle vision réductrice et rappellent que la demande d’une vraie démocratie est réelle et forte, tant en Chine qu’en Russie.
Oui, Vladimir Poutine joue à l’apprenti-sorcier en s’alliant avec la Chine qui lorgne sur les matières premières dont la Russie regorge.
Car ce n’est pas les richesses et le territoire des Etats-Unis, de la France ou de l’Allemagne que lorgnent les dirigeants de Pékin mais bien celui d’une Russie en décadence.
Tous les mauvais choix que le maître du Kremlin fait aujourd’hui, son pays devra en payer le prix demain au centuple.
Quant à la Chine, elle trouve dans Poutine un allié de circonstance dont elle pourra se débarrasser le moment venu, peut-être même pour se rapprocher de l’Occident quand il le faudra.
Néanmoins, cette alliance risque de développer un peu plus son hubris et lui faire faire quelques mauvais calculs qu’elle pourrait payer au prix fort.
Quand à l’Europe et aux Etats-Unis, ils doivent prendre cette alliance à la fois au sérieux – les régimes autocratiques font souvent des choix illogiques voire insensés – et pour ce qu’elle est dans la durée, de la poudre de perlimpinpin.
Alexandre Vatimbella

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