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mardi 4 août 2009

Editorial. Mais qu’est-ce que veut (et peut) la Chine ?


A quel jeu dangereux joue la Chine qui manie le bâton et la carotte comme si elle dirigeait l’économie mondiale et qu’elle en était, dans le même temps l’arbitre dispensé d’en respecter les règles ? Ainsi, elle prend des mesures protectionnistes à peine voilées tout en faisant à longueur de journée la leçon à tous ceux qu’elle soupçonne vouloir en faire de même ou qui envisage des mesures de rétorsions à l’encontre de ses décisions anticoncurrentielles. Elle espionne les entreprises du monde entier et met en prison les dirigeants d’un groupe multinational dont elle n’a pu acquérir une part importante du capital en les accusant soudainement d’espionnage. Elle prône la mise en place d’une nouvelle monnaie de réserve tout en continuant à acheter des dollars en masse et en demandant à Washington de ne pas manipuler les cours de sa monnaie alors qu’elle pratique cette manipulation avec le yuan depuis des années afin de permettre à ses exportations de demeurer compétitives. Elle interdit aux entreprises étrangères de racheter des entreprises chinoises alors qu’elle subventionne ses propres entreprises d’Etat afin que celles-ci acquièrent des fleurons de l’industrie des pays riches. Elle refuse que l’on intervienne dans ses affaires intérieures au motif que l’on ne peut déroger à la règle de l’indépendance nationale tout en internant dans les affaires de pays comme la Corée du Nord qui ne vit que grâce à son aide, ce qui lui permet d’être un des principaux Etats terroristes alors qu’elle n’arrête pas de dénoncer tous les terroristes du monde, en faisant de la lutte contre le terrorisme – dans lequel elle inclut abusivement l’énorme majorité des indépendantistes du Tibet ou du Xinjiang pourtant bien moins dangereux que les Coréens du Nord – une de ses priorités.

Oui, que veut la Chine ? Elle semble vouloir devenir l’axe central de la planète, rôle qu’elle pense lui être dévolue naturellement, tout en agissant comme un challenger qui peut utiliser tous les coups tordus pour déstabiliser ses concurrents plus puissants qu’elle. Mais peut-elle faire autrement ? N’est-elle pas, à bien des points de vue, un tigre de papier, expression dont elle affublait, dans les années soixante, les pays occidentaux au bon vieux temps de la Révolution culturelle ? Car, derrière son miracle économique, il y a encore beaucoup (trop ?) de pauvreté, de vétusté, d’archaïsmes que seule une fuite en avant peut masquer et qui semble être la seule voie de salut pour les autorités de Pékin. Sans oublier que le pays n’est certainement pas aussi uni que celles-ci veulent bien le dire, que le consensus sur le développement économique avant la démocratie ne tient que par cette fuite en avant où tous les gros problèmes comme la pollution ne sont pas réellement traités parce qu’ils pourraient ralentir le miracle économique, seul réel ciment de la société chinoise ou presque.

Mais la question la plus importante n’est-elle pas : la Chine peut-elle faire autrement et le reste du monde peut-il faire autrement que d’approuver cette façon de faire ? Sauf à changer de modèle de développement de la planète, la réponse semble négative. D’où cette urgence à envisager un nouveau modèle de développement et de progrès. Non pas un retour en arrière ou une situation figée qui ne résoudraient pas les gros problèmes auxquels doit faire face la Chine. Car personne n’a intérêt, à l’extérieur du pays à ce qu’il implose pour la stabilité du monde. Reste qu’il faut amener la Chine à évoluer avant que la situation ne soit irréversible ou que le pays devienne dominant et n’écoute plus personne que lui. D’autant que la Chine doit accepter les devoirs de sa nouvelle stature internationale, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Ce n’est qu’à cette condition qu’elle pourra être respectée et non crainte.


Alexandre Vatimbella

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