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lundi 2 mai 2022

Editorial. L’Europe et la guerre, un compagnonnage dramatiquement proche

Pourquoi, après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS, l’Union européenne se dépêcha d’intégrer les anciens pays de l’Est, de la Pologne à la Hongrie en passant par la République tchèque?

En grande partie pour éviter la guerre entre ces anciens pays de l’Est qui avaient nombre de litiges entre eux particulièrement au niveau des frontières et des minorités qui pouvaient vivre sur leur territoire comme les Hongrois de Roumanie.

Il s’agissait de faire de l’UE un espace de paix comme le rappelait celui qui fut alors premier ministre de la France et conduisit les premières négociations, Michel Rocard.

Et, il faut l’avouer, ce fut un succès puisqu’aucun conflit n’éclata entre ces pays malgré des revendications parfois exacerbées.

Mais cela n’empêcha pas la guerre d’être une réalité sur le contient européen qu’elle fut faussement «civile» en ex-Yougoslavie où il s’agissait de défaire une union factice imposée lors du traité de Versailles entre peuples qui avaient nombre de récriminations les uns envers les autres pour ne pas dire plus depuis des lustres ou entre deux pays entre la Russie et la Géorgie, voire entre cette même Russie et la Tchétchénie.

Alors c’est vrai qu’en France comme en Allemagne ou au Royaume-Uni, par exemple, la guerre n’est plus présente sur leur territoire européen depuis 1945 même si l’on doit ne pas oublier tous les guerres de la décolonisation comme celles d’Indochine et d’Algérie pour les Français et cette guerre larvée en Irlande du Nord pour les Britanniques.

Néanmoins, qu’est-ce que 77 ans de «paix» pour un continent qui entretien un dramatique et inqualifiable compagnonnage avec la guerre.

Oh! bien sûr, les autres régions du monde ne sont guère mieux placées que nous, ce qui n’est qu’une consolation pour le moins par défaut…

Avec l’invasion brutale, barbare, de Poutine de l’Ukraine, retour donc à la «normalité» d’une Europe berceau des deux guerres les plus meurtrières que l’Humanité ait connu jusqu’à présent et qui multiplia les conflits au cours des siècles dont la plus longue, la Guerre de Cent ans entre la France et l’Angleterre (si l’on excepte une autre qui opposa les Pays-Bas aux îles Scilly au large des Cornouailles qui a duré de 1651 à 1986, soit 335 ans, parce qu’on oublia de signer un traité de paix, il faut dire qu’elle ne donna lieu à aucune bataille, à aucun mort et ne put avoir lieu faute de combattant qui se rendirent à l’Angleterre, alliée des Hollandais, dès la déclaration de guerre!).

«La paix est l'intervalle entre deux guerres» selon le bon mot de Giraudoux mais tellement vrai.

Nous avons donc réussi à gérer cet intervalle pour une durée d’une longueur inhabituelle qui fait que plusieurs générations qui sont nées en France n’ont pas connu physiquement une guerre.

Mais l’agression de l’Ukraine, pays qui n’est pas si éloignée de chez nous et frontalier de l’Union européenne, nous a réveillés d’une fausse félicité qui ferait que nous aurions vaincu l’innommable et que nous n’aurions plus qu’à nous protéger des terroristes illuminés et assassins qui ensanglantent nos villes à périodes répétées mais qui n’ont pas réussi jusqu’à présent à nous déstabiliser.

Ils nous ont, bien sûr, obligés à nous battre de l’Afghanistan à la Syrie en passant par le Mali et à engager nos soldats mais dans des conflits qui n’ont jamais débordé jusqu’en Europe.

Nous revoilà donc, grâce à la scélératesse d’un mégalomane paranoïaque, revenu aux temps guerriers mais qui pouvaient malheureusement douter que de leur retour tellement l’Histoire nous enseigne le contraire ainsi que la réalité quotidienne aux quatre coins de la planète?

La guerre fait partie de ce tragique de l’Histoire dont nous ne sortirons jamais mais dont nous pouvons faire en sorte d’éloigner le plus possible la survenance tout en nous préparant à son inévitable retour.

Et, en l’espèce, nous, les Européens, plus particulièrement des pays comme le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, avons failli dans la mise en place d’une vraie défense commune avec les moyens nécessaires en voulant croire que si nous étions «gentils» personne ne viendrait nous embêter...

Cette niaiserie nous a mis dans une incapacité à dire à un personnage comme Poutine – qui croient dur comme fer au déclin moral des Européens – qu’il ne pouvait agir à sa guise.

Il l’a donc fait en Géorgie et en Ukraine, pour ce qui est de l’Europe et nous n’avons pas réagi à la hauteur de son défi.

Discuter aujourd’hui d’une défense européenne à la hauteur est une avancée mais l’époque n’est plus à se poser la question mais à agir parce que ce n’est plus d’une faillite dont on devra parler mais d’un renoncement irresponsable face à la réalité qui est là même si on ne l’aime pas.

Fermer les yeux pour inventer un monde qui n’existe pas, voilà le pire qui nous est arrivé.

Les laisser fermer serait une forfaiture et une indignité, une trahison pour les générations futures.

 

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